Portrait : Voici le parcours de Moussa 2 Konaté, manœuvre de l’éducation guinéenne !

Portrait : Voici le parcours de Moussa 2 Konaté, manœuvre de l’éducation guinéenne !

« Portrait » est une rubrique sollicité par nos nombreux lecteurs, il s’intéresse sur le parcours fulgurant des encadreurs du système éducatif guinéen. Qui tant bien que mal, produisent autant d’énergie dans la formation des futures élites guinéennes. C’est aussi un espace ouvert aux écrivains, aux scientifiques et aux personnalités influentes qui marquent ou ayant marqué l’histoire. Dans ce premier numéro, nous avons décidé de vous faire découvrir Moussa 2 Konaté, censeur du groupe scolaire Jean Mermoz. Educateur chevronné et père de quatre 4 enfants dont une fille, Moussa 2 Konaté incarne autour de lui une réputation hors du commun. Sa vision sur l’éducation guinéenne est le fruit de longues années de services passées au sein de cette entité. Ce qui d’ailleurs place en lui, une confiance indubitable des parents des enfants dont il a la charge d’encadrer. Cet enseignant a accepté de se prêter à nos questions pour en savoir plus sur lui.

Né dans le sud-ouest de la Côte d’Ivoire dans une localité appelée tabou, Moussa 2 Konaté y a fait ses études primaires et secondaires. Mais avec le tumulte des années 90, son père juge nécessaire de l’envoyer en Guinée où entre 1991-1992, il fait le lycée Moryfindian et affronte le bac 1 et bac 2. Ces deux examens réussis, il passe aussi le concours pour finalement être orienté à la faculté des lettres et sciences humaines de l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry. Après le premier cycle, il se retrouve en histoire précisément dans la filière professeur d’histoire. « A l’époque, ce n’était pas chose aisée qu’un jeune de mon âge accepte de faire la profession de professeur d’histoire pour se mettre au service de ses frères pour venir enseigner », se remémore-t-il.

L’enseignement est pour cet homme la meilleure façon de partager ce qu’on a comme connaissance avec ses frères. « … se mettre au service de ses frères en leur apportant le savoir, ce que vous avez appris, je pense qu’il n’y a pas plus meilleur que ça. C’est un sacrifice et c’est une profession que mon père a beaucoup aimé. Il a voulu que j’apporte ma contribution à la formation des jeunes de demain », pense le jeune homme. Comme toute profession, tout n’a pas été rose au départ. La difficulté pour lui résidait dans le fait de s’être retrouvé où il ne désirait pas pour un début. Mais suivant les instructions de son père qui décédera en 2010, il accepte de se mettre aux services de la nation pour apprendre.

« C’est comme ça je me suis retrouvé à l’éducation parce qu’après le premier cycle, il y avait test pour être orienté et moi, mon premier choix à la faculté des sciences c’était d’abord l’aménagement du territoire. Le 2ème choix, c’était la sociologie et le 3ème choix, c’était l’histoire. Dans un entretien avec les différents chefs de département, chacun a essayé de parler des avantages de son département et j’avais un penchant pour aménagement du territoire mais j’ai fini par aimer l’histoire. J’y ai été orienté. Pour un départ, je n’ai pas voulu parce que je tenais vaille que vaille à faire aménagement du territoire mais le chef de département à l’époque, Monsieur Saidou Magassouba m’a appelé pour me dire : ‘’Konaté, que tu le veuilles ou pas, tu feras histoire. Tu le changeras pas parce qu’on a besoin de bons enseignants, de bons étudiants pour enseigner nos enfants ‘’. Donc finalement, j’ai fini par accepter et j’ai fait la licence et la maîtrise en histoire ».

Moussa 2 Konaté et Jean Mermoz…

 »Aujourd’hui, les gens pensent que je suis un peu très rigoureux mais c’est comme ça moi j’ai étudié. Ne pas faire la même chose avec les jeunes que j’ai la charge d’encadrer, c’est trahir les parents ».

Venu à Jean Mermoz vers 2003 en qualité d’enseignant, il est recruté après test par le premier censeur qui était là. Il donne des cours alors quatre heures dans la semaine, de 8heures à 12heures les vendredis. Aux mots de découragement de son ami qui l’avait pourtant encouragé à postuler, Moussa Konaté répond : « écoute, je viens dans un établissement où je ne suis pas connu. Avec le temps, ils finiront par découvrir les compétences, finalement ils vont nous porter confiance ». Cela arrive assez rapidement car de quatre heures, il passe à douze heures l’année suivante et l’année d’après, 26heures. Surchargé, il fait appel à un ami pour l’aider alors qu’il assiste le censeur dès qu’il n’est pas en classe. Lorsque le censeur est muté pour Dinguiraye, il demande à être remplacé par Moussa 2 Konaté qui accepte bien qu’il soit en ce moment conseiller technique du proviseur au Semyg.

Aujourd’hui, l’école Jean Mermoz compte un effectif de près de 1000 élèves alors qu’au moment où il l’intégrait, il n’y avait même pas 500 élèves. « L’essentiel n’est pas le bagage intellectuel et lorsque vous êtes appelé à devenir chef, il faut avoir un sens managérial. Il faut essayer d’approcher les un et les autres, parce que chacun peut un peu. Donc je me suis mis aux services de mes collaborateurs sans les quels moi je ne serai rien, ça il faut le dire. J’ai trouvé un état d’esprit à Jean Mermoz, j’ai apporté ma modeste contribution », a-t-il déclaré. « Aujourd’hui, les gens pensent que je suis un peu très rigoureux mais c’est comme ça moi j’ai étudié. Ne pas faire la même chose avec les jeunes que j’ai la charge d’encadrer, c’est trahir les parents. Comme on le dit : »qui aime bien châtie bien « . Les enfants doivent travailler avec leurs propres capacités », explique le censeur en parlant de la rigueur qu’on l’attribue.

 »si nous continuons à faire tout ce que nos enfants veulent, on finira par les détruire mais faisons ce qui est bien pour nos enfants, ça y va dans l’intérêt de tous »

De la profession d’enseignant …

« Moi je pense qu’il n’y a pas d’option d’avenir. Tous les métiers se valent. Si vous avez la chance d’opter pour un métier, il faut avoir l’amour du travail que vous faites. Sans cet amour, vous n’aurez pas gain de cause. Moi au jour d’aujourd’hui, je n’envie personne. Dieu a voulu que je sois enseignant, j’enseigne. Dieu a voulu que je sois censeur, je fais correctement mon boulot parce que chacun a un métier qui lui est destiné. Si vous mettez de l’amour dans ce que vous faites, Dieu vous aidera dans l’accomplissement et l’atteinte de vos objectifs » estime l’enseignant. En plus d’être enseignant, Moussa 2 Konaté est aussi un chef de famille. Comme tout père, il se veut exemplaire.

« Je pense que le mieux que l’on puisse faire pour un enfant, c’est l’éducation, c’est la formation. Ceux qui n’ont pas compris cette situation, qu’ils acceptent que les enfants viennent à l’école, qu’ils acceptent de se mettre au service de leurs enfants parce que quoi qu’on cherche, tout ce qu’on cherche à longueur de journée, c’est pour nos enfants. Mais si nous n’avons pas de temps pour nos enfants, on hypothèque leur avenir. Il faut préciser que si nous continuons à faire tout ce que nos enfants veulent, on finira par les détruire mais faisons ce qui est bien pour nos enfants, ça y va dans l’intérêt de tous » prône-t-il.

Ses mots sur l’éducation guinéenne…

 »La Guinée aussi est l’un des rares pays où on trouve des livrets scolaire sur le marché, ça se vend à 3 000gnf ou 5 000gnf ».

Le système éducatif guinéen est l’un des plus critiqués surtout par ses propres acteurs. Ce qui fait que son amélioration intervient très souvent lors d’échanges. « Notre système éducatif, il faut le dire est malade. Notre système doit être revu dans l’intérêt supérieur de la nation. C’est bien d’investir mais si des dispositions ne sont pas prises, ça sera très grave pour des générations futures. La Guinée est l’un des rares pays où au niveau du pré-universitaire, il y’a plus d’écoles privées que de publiques. En Côte d’Ivoire, il y’a plus d’écoles publiques que d’établissement privés. Ce sont ceux-là qui sont exclu des écoles publiques qui se retrouvent dans les privés » Commence-t-il. Si en Côte d’Ivoire, il existe trois moyennes : la moyenne de passage, celle de comportement et celle d’exclusion, chez nous, c’est soit tu passes ou tu redoubles. « Cette situation tue le système éducatif. Sans rigueur, on ne peut pas produire de bons fruits. Nos enfants qui sont là si nous sommes complaisants, ils finiront par tout délaisser, ça c’est clair. La Guinée aussi est l’un des rares pays où on trouve des livrets scolaire sur le marché, ça se vend à 3 000gnf ou 5 000gnf. L’enfant il redouble chez nous ici, il se trouve un livret, il trouve quelqu’un qui fait un cachet qui en réalité dit qu’il passe en classe supérieure, il met le cachet. Ça tue le système. Si les autorités pouvaient comprendre, changer ces livrets. Moi, je n’ai vu mon livret que lorsque je venais en Guinée, le livret circule entre les écoles mais aujourd’hui, c’est le parent d’élève qui prend le livret et envoie là où il veut. Il y’a des trucs si c’est n’est pas corrigé, quoi qu’on fasse, on n’aura pas un résultat souhaité donc il faut repenser notre système éducatif dans l’intérêt supérieur de la nation » préconise Moussa 2 Konaté.

Son message vers les parents et les apprenants…

 »Certains parents pensent que le fait de payer la scolarité pousse leurs enfants à accéder en classe supérieur même s’ils ne le méritent pas »

« Je dirais aux parents d’élèves d’accorder de l’intérêt à la formation de leurs enfants parce que certains parents pensent que l’école est un dépotoir. J’inscris mon enfant dans une école privée, il doit passer en classe supérieure. Certains en réalité viennent nous trouver, ils ne connaissent même pas la classe de leurs enfants, il faut appeler pour demander. Certains parents pensent que le fait de payer la scolarité pousse leurs enfants à accéder en classe supérieur même s’ils ne le méritent pas. L’échec est un conseil. S’il tire les leçons de son échec, il pourra rebondir demain. L’année passée session 2018-2019, j’ai eu trois 3 boursiers pour le Maroc. Le 30ème de la République Bérété avait échoué l’année surpassée, mais il a repris avec courage c’est-à-dire que vouloir c’est pouvoir. L’enfant reste le fruit de trois éducations : la maison, l’école et la rue. Si la maison et l’école ne conjuguent pas les efforts, l’enfant sera récupéré par la rue et finalement c’est la famille qui a perdu. C’est le pays qui perd quelqu’un qui pourrait apporter sa modeste contribution à notre système éducatif, à notre nation » a-t-il laissé entendre pour conclure.

Nacissé Tounkara

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