Des cours à distance : Quand garder son poste entraîne le ministre Mory Sangaré à vendre des illusions…

A l’instar des autres secteurs d’activités économiques, l’enseignant n’est pas épargné par les conséquences liées à la propagation du COVID-19.
Les mesures prises dans ce domaine notamment, sont sans précédent. La réouverture des classes ne dépendant en particulier que de la victoire des Guinéens sur la maladie qui, aujourd’hui encore, continue à décimer le monde.
L’incertitude est telle qu’il se susurre que le pays court vers une année blanche. Ce qui serait inédit dans l’histoire récente de la Guinée. Inédit au point qu’on a l’impression que certains ne veulent pas se résoudre à cette solution extrême. Ainsi, récemment, le premier ministre, Ibrahima Kassory Fofana, a admis que cette option n’est pas l’idéale. Mais se voulant tout aussi réaliste que pragmatique, il avait ajouté : « pour ne pas qu’il y ait une année blanche, il faut que chacun respecte les gestes barrières pour qu’on en finisse rapidement avec la maladie ; comme ça les cours reprendront ». Ça peut ne pas faire plaisir, mais c’est cela la vérité.
Car l’autre solution qui était envisagée par son ministre de l’Education nationale et de l’Alphabétisation, est tout sauf réaliste. Pour éviter la perspective d’une année blanche, Mory Sangaré entendait en effet miser sur les cours à distance. En d’autres termes, estimait-il, dans les zones où l’internet est accessible pour les élèves, des plateformes seraient mises à leur disposition pour qu’ils puissent suivre les cours et que pour les autres qui n’auraient pas directement accès à ces cours via internet, il leur serait déposé les copies physiques des cours. A charge pour eux, ensuite d’appeler via des numéros qui leur seront indiqués pour poser des questions sur les aspects qu’ils n’auraient pas compris. C’est peut-être génial comme idée. Mais c’est une véritable illusion qu’a essayé de vendre aux Guinéens le patron du MENA.
Des cours à distance tels que décrits précédemment, dans un pays avec un taux de pénétration de l’internet en-dessous de 30%, est tout simplement chimérique. L’autre chose qui noie cette proposition farfelue, c’est le niveau de vie du Guinéen. En Guinée, faudrait-il le rappeler au ministre de l’Enseignement, le taux de pauvreté est de 57%. 57%, la proportion des Guinéens qui vivent avec moins d’un dollar (moins de 10.000 GNF) par jour. Qu’on imagine alors combien d’élèves guinéens, en milieux rural et urbain, sont capables de s’offrir un téléphone androïde ou un ordinateur ! Qu’on songe aussi à ceux qui, au-delà du téléphone, peuvent disposer des forfaits de connexion. Qu’on prenne également en compte la défaillance de cette même connexion dans de nombreuses localités.
Bref, comme on le disait, l’idée de Mory Sangaré n’avait rien de réaliste. Ce qui veut dire qu’elle a été mal mûrie. Et c’est à croire qu’elle n’a été émise qu’en guise de coup médiatique raté de la part d’un ministre qui a pensé qu’il fallait faire avec lui, au moment où l’idée d’un remaniement ministériel est évoquée. Sauf que si c’était cela l’objectif, la démarche pourrait être plutôt contre-productive.
Mosaïqueguinée